Parce que les mots ont leurs limites mais un si grand pouvoir, Parce que l'écrit est ce qui restera de plus tangible de nos passages... Parce que l'intimité se crée par le langage, Et l'amitié par les lignes en partage.
Page blanche
Dépasser ce moment où le nœud se plaque au creux du ventre. Ne pas céder à la tentation de la fuite. Ne pas se réfugier dans une activité soudainement très urgente aux fins de se débarrasser de cette étrangeté qui fourmille et rampe comme une couleuvre dans les herbes folles. Au contraire, traquer l’animal, le coincer dans le logis de mon imagination en guettant l’instant précis où il soulèvera sa tête. Choper et apprivoiser sa nature sauvage en enfouissant mon regard dans le sien. Nous surprendre et nous étonner mutuellement. Nous habituer à vivre dans le même espace , en nous jaugeant, nous observant. Commencer alors à nous estimer…
Attendre silencieusement, campée sur le strapontin. Attendre comme on attend un ami trop longtemps parti et qui, c'est certain, reviendra bientôt.
Les mots sont des invités qui se réjouissent de se faire désirer. Le mot et le désir, de longues dates, sont des êtres intimes. L’un comme l’autre résistent à l’impatience et ne paraissent que lorsqu’ils se perçoivent... suffisamment accueillis.
Alors je reste. Envers et contre tout. Contre les vents du doute, les sables mouvants redoutables du manque de confiance, les orages destructeurs de la comparaison à mes semblables (que je vois toujours plus avancés et meilleurs que moi).
Je sens mon cœur palpiter, les heures se dissoudre, le néant, le vide, l’obscurité s’étendre. Où donc les étoiles de l’enthousiasme candide des premiers jours se sont-elles évadées ? Sont-elles restées accrochées aux chevelures des comètes furtives chevauchant les rêves ?