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Poésie, chanson, échanges épistolaires, théâtre, nouvelles, roman.....
L'expression écrite a-t-elle véritablement un sens ? Quelle est sa quête ?
Et la mienne, quelle est-elle, à suivre ainsi ce fil qui se déroule sur la lisière de mes rêves ?
Si je n'ai pas trouvé la réponse ni à la seconde ni à la troisième de ces interrogations, concernant la première, en expérimentant les genres cités, j'ai néanmoins repoussé mes limites,
exploré ma liberté, reconnu mes barrières, plongé dans mes propres zones d'ombre, apprivoisé mes doutes, rencontré des visages, aimé des êtres uniques, anticipé sur des événements personnels,
bousculé mes préjugés, consolé des chagrins, croisé des personnages pour certains retournés au néant, pour d'autres si fascinants qu'ils manquèrent de m'aveugler au point de déplorer de
revenir à la substantielle réalité.
Etty Hillesum "histoire de la fille qui ne savait pas s'agenouiller" - C. JULIET, D. STERCKX et C. VIGEE - Editions ARFUYEN - Témoignage - 183 pages
Etty HILLESUM
"Quelle étrange histoire, tout de même, que la mienne, celle de la fille qui ne savait pas s'agenouiller. Ou - variante - de la fille qui a appris à prier. (Journal 10 octobre 1942).
Ce livre est un hommage rendu par quatre intervenants :
Liliane HILLESUM, l'une des dernières survivantes de la famille, préface l'ouvrage en présentant le contexte familial et historique. Dans sa conclusion, elle interpelle le lecteur sur cette réflexion magnifique écrite par sa cousine au seuil de son extermination : "La force essentielle consiste à sentir au fond de soi, jusqu'à la fin, que la vie a un sens, qu'elle est belle" (5 juillet 1942). Qui resterait insensible à l'interogation de Liliane HILLESUM : "Quel sens demandera-t-on ? Et comment oser parler de beauté ? Etty a cette simple indication, remède à toutes les tiédeurs et toutes les complaisances, et pour moi sans doute la meilleure réponse " Là où l'on est, être présent à cent pour cent". Mon "faire" consistera à "être" (30 septembre 1942)
Le Père Dominique STERCKX lit et commente avec une grande sensibilité huit prières de la jeune femme juive. Dans son analyse résonne toute la force et la liberté intérieure que se façonna Esther HILLESUM (dite Etty). Bouleversante Etty, qui jamais ne baissa les bras face à l'atrocité mais qui transcenda toutes les épreuves, pour en faire un hymne à Dieu et à la vie.
Claude VIGEE met en lumière pour sa part l'incroyable mission qu'Etty se donna de "Secourir Dieu dans la Shoah".
"Parmi les témoignages les plus bouleversants des années noires qui soient parvenus tardivement aux survivants de la génération de la Shoah, s'impose à nous celui d'une jeune femme juive d'Amsterdam, née en 1914, assassinée avec tous les siens à Auschwitz en 1943, après un séjour au camp de Westerbork, à l'est de la Hollande occupée par les nazis. Le journal manuscrit et les lettres d'Etty HILLESUM, sauvées par miracle de la destruction, mais non de l'oubli, sont enfin disponibles en grande partie en traduction française après un demi-siècle de silence total. Westerbork, dont Etty partagea les sinistres conditions d'existence de juillet 1942 à septembre 1943 - date de sa déportation à Auschwitz -, était un camp de concentration de transit hollandais où tous les juifs des Pays-Bas, natifs ou immigrés, furent parqués à tour de rôle, au rythme des rafles policières, en attendant leur envoi vers les camps de la mort de l'Est européen... Plus de 100.000 juifs de Hollande y passèrent dans l'attente de la prochaine "sélection" pour les chambres à gaz en Pologne... Au milieu de tant de victimes, j'évoque avec grande émotion la figure étonnante d'Etty HILLESUM... Loin de tout pathos faussement pieux, comme de toute pruderie convenue... Etty livrée aux meurtriers nazis a su puiser seule aux heures de la pire détresse, privée bientôt de tout espoir terrestre, sa force d'affirmation, préservant l'élan réitéré d'une folle confiance gratuite dans la condition des créatures d'ici-bas, face aux circonstances inhumaines de la détention dans l'enfer concentrationnaire. Cette énergie nous soutient encore aujourd'hui dans notre combat intérieur quotidien..."
Claude VIGEE met en avant tout l'abnégation dont fit preuve Etty. Il nous livre quelques témoignages qu'elle laissa à travers ses lettres relatifs aux conditions de vie et de détention dans le camp, dont les mots résonnent et vous tordent le coeur. Etty n'aura eu de cesse que d'observer et de rapporter avec justesse dans son écriture pour témoigner mais surtout pour transmettre jusqu'à l'épuisement dans un effarant optimisme et un art poétique déconcertant : "Quand je dis que j'écoute "au dedans", en réalité c'est plutôt Dieu en moi qui est à l'écoute : ce qu'il y a de plus essentiel et de plus profond en moi écoute l'essence et la profondeur de l'autre... je voudrais pouvoir venir à bout de tout par le langage, pouvoir décrire ces deux mois passés derrière les barbelés, les plus intenses et les plus riches de ma vie Je te suis reconnaissante, mon Dieu, de me rendre la vie si belle, partout où je me trouve, que chaque endroit que je quitte m'emplit de nostalgie"
Enfin, Charles JULIET, revient sur l'émotion écrasante et les impressions que lui procurèrent la lecture des écrits d'Etty : "Une vie bouleversée" et "Les Lettres de Westerbork". Ils sont le témoignage poignant et exceptionnel d'une écrivaine lucide sur son sort mais qui crée son propre espace de liberté : "sous la pression des lois et des règlements édictés, le champ de sa vie se restreint. Mais plus il se restreint et plus son espace intérieur grandit et s'enrichit... En fait, elle a subit une véritable mutation. En quelques mois, elle a mis à bas l'étroite prison de son moi, de son égocentrisme, et accédé à un état qui n'est que bonté, compassion, joie d'exister... L'immense amour qui la possède lui octroie quiétude, force, stabilité, la soustrait de l'affliction qu'elle devrait normalement éprouver. "Partout où s'étend le ciel, on est chez soi. En tout lieu sur cette terre, on est chez soi lorsqu'on porte tout en soi". "Sa force" dit Charles JULIET, "et sa liberté intérieures lui donnent le pouvoir de tout surmonter". Ainsi, Etty voit s'épanouir en elle "un amour et une félicité proprement ineffables".
Charles JULIET conclut : "L'auteur d'un livre aimé, il arrive qu'on tienne à lui autant qu'à un être de chair. Il participe à notre activité intérieure et c'est souvent qu'on dialogue avec lui. Le jour où j'ai lu pour la première fois "Une vie bouleversée", Etty est devenue une amie, et cette amie ne m'a plus quitté. Son journal relate une expérience tragique, et pourtant, il nous communique de l'énergie, nous aide à garder confiance en l'homme, avive en nous ce que nous avons de meilleur. Il est de ces ouvrages qui demeurent en nous et nous imposent de vivre avec exigence".
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Pour en savoir plus sur Etty HILLESUM, de nombreux sites existent, dont celui-ci qui dresse d'elle un remaquable portrait : http://www.nouvellescles.com/article.php3?id_article=167
Selma une femme libre - Gérard CARDONNE - Le Verger Editeur - roman - 301 p
Présentation de l'éditeur : pour répondre à quelque mystérieux appel du Sud " Selma, une femme libre " est un grand roman d'amour, à cheval sur deux mondes différents.
Il s'écrit comme un film et l'on voyage autant dans l'Histoire de la Tunisie que dans le pays lui-même. La guerre en Irak projette son ombre sur le déroulement de l'intrigue.
Ce roman est un puissant chant sensuel, comme si le souffle du chott el Jerid faisait tourner les pages. Convaincu de la grande proximité des cultures, Gérard Cardonne offre un trousseau de clés au lecteur. A lui d'ouvrir les portes de la médina de Tunis, de Jerba, de Tozeur, de Sidi Bou Saïd.
A chacun de voir et d'écouter, de sentir et de ressentir le pays, le peuple, la femme.
Hymne à la sensualité du quotidien, ce roman décline le mystère conjugué de l'amour et du mektoub pour mieux décrire les destins croisés de deux personnages, avec un brin de musique entre les lignes, toute la chaleur bigarrée tunisienne, la douceur du Sud et de Tozeur, cette magicienne de la nostalgie amoureuse.
Gérard Cardonne écarte les éclairages convenus et met l'accent sur le point de vue de la femme de ce pays pour jeter un pont entre le Maghreb et la France, en confrontant le pays du dehors et celui de dedans. Selma existe : elle a une vie, un itinéraire. Vous serez certain de l'avoir rencontrée sur la plage de Kelibia, à la Ghriba de Jerba ou dans la palmeraie de la Corbeille de Nefta. L'écriture se concentre sur la relation entre deux personnages, qui ne vont pas l'un vers l'autre, qui attendent, qui ne savent pas qu'ils s'aiment, qui ne veulent pas le savoir, parce que cet amour leur semble impossible.
Auteur engagé sur le terrain et en écriture, Gérard Cardonne a publié avec succès une série d'ouvrages sur différents thèmes de société. Ce roman fait partie de la saga consacrée aux droits de la femme. Après la Bosniaque, l'Algérienne, l'Afghane, voici la Tunisienne, en attendant la Sénégalaise. Il signe ici son vingt-troisième ouvrage.
Mon appréciation personnelle : un style suave, un vocabulaire riche en couleurs et en parfums, des descriptions lumineuses et enchanteresses, une plume habile et poétique, plongent le lecteur dans une langueur lyrique fort chaleureuse, tout en lui claquant de temps à autre au passage quelque idée très affirmée.
Gérard CARDONNE milite pour la libération de la femme dans le monde et penche pour une vision modernisée de l'islam compatible avec les lois et les valeurs républicaines.
Son livre est avant tout une belle histoire d'amour entre un Alsacien et une Tunisienne émancipée, chacun aux prises avec ses contraintes professionnelles (ils sont avocats et représentent l'un l'époux musulman français et l'autre l'épouse tunisienne ayant fui son conjoint), leurs désirs, leurs fêlures passées intérieures et cette passion à laquelle ils ne peuvent ni ne veulent échapper. C'est encore un hymne véritable à la Tunisie, à ses paysages splendides, à sa cuisine, à ses habitantes, à sa démocratie.
Un bémol que j'adresse à l'auteur et à l'éditeur : par pitié, faites relire avant parution afin d'éviter aux lecteurs d'agaçants désagréments qui nuisent à la qualité pourtant certaine de l'oeuvre !
La malédiction de Darwin - Philippe AUBERT - Editions LE VERGER - Polar - 191 pages
Présentation de l'éditeur :
"Que s'est-il passé ce dimanche-là au 2, Moor Cottage, Findon, West Sussex, Grande-Bretagne ? Qui a tué, avec une sauvagerie consommée, la belle conférencière Elisabeth Wright ? Qui pouvait bien en vouloir à cette intellectuelle inoffensive ?
Inoffensive, voire... La défunte conférencière était chargée, par une puissante et discrète organisation américaine, de mener une série d'interventions sur le «Dessein Intelligent», cette nouvelle théorie qui divise le monde des croyants, tout comme celui des scientifiques. Désigné pour cette enquête délicate, l'inspecteur Glen va croiser une nouvelle fois le chemin du pasteur Brown. Criminologie et théologie ne seront pas de trop pour élucider le crime de Moor Cottage ! Le XXIe siècle devait être religieux, ou ne pas être... Le roman de Philippe Aubert paraît à un moment où les questions religieuses n'ont jamais été aussi brûlantes. Avec un style dépouillé et un humour «so british», l'auteur nous conduit aux sources du fondamentalisme.
Pasteur en Alsace, Philippe Aubert est un passionné de la campagne anglaise, dans l'univers feutré de laquelle ses personnages entraînent le lecteur."
Mon appréciation personnelle : dans une écriture sobre et directe, ce polar installe l'ambiance dès les premières pages. L'énigme devient rapidement happante, évoluant dans le milieu des biologistes et des créationnistes. Pasteur, évêque, policiers, se penchent sur ces schémas idéologiques, tandis que se jouent dans l'envers de ce décor d'autres enjeux, d'ordre sentimental.
Nota : présence de l'auteur à la librairie Broglie de Strasbourg le 15 juin 2007 à 15 h pour signatures.
Col de l'Ange - Simonetta GREGGIO - Editions STOCK - Roman - 142 pages
Nunzio a disparu brutalement il y a 17 jours laissant derrière lui son amant, son frère Marcus et Blue son amie de coeur et d'enfance. Nul ne sait ce qui lui est arrivé. Son âme erre encore. Quelque part il flotte et va prêter sa voix dans un tutoiement inaudible et imperceptible aux vivants, à ce livre dont il est le narrateur, observateur de sa mort et de sa suite, des réactions de Marcus depuis longtemps épris de Blue et de celle de Blue, elle-même réfugiée avec sa chienne Youza au Col de l'Ange où l'épie secrètement Marcus. C'est de cet endroit, il y a bien des années, que Nunzio et Blue étaient partis ensemble afin de se construire (et de se reconstruire) une vie . Les souvenirs d'enfance sont peu à peu mis en lumière - tant les inoubliables bons moments que les plus violents - sur un fond naturel où se mêlent les sentiments passés, la douleur du moment présent, le désir, le besoin de continuer à vivre. L'histoire de ces trois personnages nous est distillée lentement dans une écriture juste et sans fausse pudeur. Nunzio, qui a mené une vie de désinvolture et d'insouciance, seul à connaître les circonstances et les motifs de sa mort livrera la vérité au lecteur, s'attendrissant devant ce couple qui se rapproche dans le chagrin et la commune consolation en se demandant si celui-ci saura perdurer.
Note de l'éditeur : "Quand tu étais petite, on t'appelait Nine, puis à un moment donné, pour tout le monde, tu a été Blue : la couleur du ciel dans la tête des gens, et le blues, la musique et la mélancolie. Tu étais un poulet rôti, une escarbille. Tu as fleuri d'un coup. Tu es devenue une femme, la plus belle. Tu t'es transformée sous les yeux de Marcus. Avant, il pouvait te manger la joue d'un baiser, sans arrière-pensées. Ensuite, il n'a rien désiré autant qu'entourer tes chevilles de ses deux doigts, tes poignets de son coeur en lanières, et ta taille d'un noeud de pendu."
Italienne, Simonetta GREGGIO écrit en français. Elle a publié un premier roman (La Douceur des Hommes) en 2005, chez STOCK.
Derniers fragments d'un long voyage - Christiane SINGER - Albin Michel - Journal - 136 pages
Note de l'éditeur : "Le 1er septembre, un jeune médecin annonce à Christiane SINGER qu'elle a encore six mois au plus devant elle. Le 1er mars, Christiane SINGER clôt le carnet de bord de ce long voyage.
"Le voyage - ce voyage-là du moins - est pour moi terminé. A partir de demain, mieux : à partir de cet instant, tout est neuf. Je poursuis mon chemin. Demain, comme tous les jours d'ici ou d'ailleurs, sur ce versant ou sur l'autre, est désormais mon jour de naissance."
Mon appréciation personnelle : ondes concentriques qui se répandent dans mon âme... Les mots déposés par Christiane SINGER dans ce livre vont changer mon regard sur une vie...
Durant toute la sienne, parcourant le monde, inlassablement, avec une ferveur toujours grandissante, évolutrice, communicative, elle battait le rassemblement , la convergence des consciences dans l'unité indéniable de l'amour et de la tolérance.
En parcourant ses lignes, j'ai songé à l'immense liberté qu'elle s'était accordée. La liberté totale du partage. La sincérité totale dans ses écrits, toute spontanée.
Jusqu'à son dernier souffle, Christiane SINGER n'a eu de cesse que de célébrer. Célébrer la vie avec émerveillement, jusqu'à la béatitude en transcendant la souffrance. Quelle leçon !
Les paroles qu'elle nous laisse, tous ces "fragments" qui, mis bout à bout, rayonnent la quête d'un être ! C'est là qu'elle fut exceptionnelle : dans sa manière d'être au monde, d'être en et de recevoir chacun, avec son magnifique regard sur toutes choses et toutes vies.
Adieu Christiane SINGER ! Puissiez-vous, dans la grâce infinie qui vous a comblée, poursuivre votre trajectoire. Puisse votre oeuvre régénérer, interpeler, éclairer, guider, répondre à ces milliers d'autres âmes dans leur propre quête.
Lecteurs qui venez ici, ce livre est celui qu'il vous faut lire ! Attendez-vous à recevoir de puissants et bouleversants messages ! Ensuite, quand vous l'aurez lu, quand vous aurez compris et reçu ce que vous aurez à y trouver, comme moi probablement, jamais plus il ne vous quittera.